Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Résistances et Libertés
15 janvier 2021

. Surveillance par drone : la Cnil sanctionne le ministère de l’Intérieur

Aucune mission de surveillance ne peut se faire par ce moyen léger tant qu’un cadre légal ne viendra garantir le respect des libertés individuelles.

clônes

 

Au printemps, la police nationale et certaines polices municipales avaient utilisé les drones pour surveiller des airs le respect du confinement puis du déconfinement. LP/Benjamin Derveaux

Un « rentrez chez vous! » venu des airs, qui n'aurait pas dû exister. Le 12 janvier, la Cnil a sanctionné le ministère de l'Intérieur, et le fait savoir ce jeudi, pour avoir utilisé des drones de surveillance pendant le confinement du printemps.

« A l'issue d'une procédure de contrôle initiée en mai 2020, la formation restreinte, organe de la Cnil chargé de prononcer les sanctions, a rappelé à l'ordre le ministère de l'Intérieur pour avoir procédé à des vols de drones équipés de caméras en dehors de tout cadre légal », écrit la Commission nationale de l'Informatique et des Libertés dans un communiqué pour « rendre publique » sa décision.

Au printemps dernier, à Melun (Seine-et-Marne), à Creil et Beauvais (Oise), ou à Lyon (Rhône), la police nationale avait utilisé des drones pour épier les rues et verbaliser les irrespectueux du confinement tout en respectant elle-même les distances. « L'utilisation de tels drones lui paraissant susceptible d'impliquer le traitement de données personnelles, la présidente de la Cnil a adressé un courrier au ministère de l'Intérieur le 23 avril 2020 afin d'obtenir des précisions sur ces dispositifs et leurs caractéristiques », précise-t-elle.

Les personnes filmées identifiables

Un mois et demi plus tard, l'instance de contrôle a adressé des questionnaires au ministère de l'Intérieur, à la préfecture de police de Paris, à un commissariat et à un groupement de gendarmerie. « En réponse, le ministère a indiqué utiliser des drones équipés de caméras, notamment pour vérifier le respect des mesures de confinement, pour la surveillance de manifestations, pour des missions de police judiciaire (telles que la reconnaissance d'un lieu avant une interpellation ou la surveillance d'un trafic de stupéfiants), ou encore pour la surveillance de rodéos urbains ».

En juillet, dans les locaux de la préfecture de police, les membres de la Cnil ont assisté à un vol d'essai de l'un des drones. Ils ont constaté que les personnes filmées étaient identifiables. Mais aucune base légale n'autorise cela, pas plus que le traitement des données collectées.

« A ce jour, aucun texte n'autorise le ministère de l'Intérieur à recourir à des drones équipés de caméras captant des images sur lesquelles les personnes sont identifiables. De même, alors qu'elle est obligatoire, aucune analyse d'impact n'a été communiquée à la Cnil concernant l'utilisation de ces drones. Le public n'était pas non plus informé de l'utilisation des drones comme il aurait dû l'être », note l'autorité indépendante.

Et si le ministère de l'Intérieur a développé un programme permettant de flouter les personnes, il n'est intervenu qu'en août, relève la Cnil, et ne peut être réalisé qu'a posteriori, une fois les images collectées et traitées. Le ministère de l'Intérieur a en outre la capacité de désactiver le floutage.

Quid de l'armée ?

Cette décision fait corps avec celles du Conseil d'Etat rendues plus tôt. Au mois de mai, le Conseil d'Etat avait exigé de l'Etat qu'il cesse d'utiliser les drones, notamment à Paris, pour s'assurer de la bonne application des règles du déconfinement. Et le 22 décembre, la plus haute juridiction administrative en droit français a interdit au préfet de police de Paris d'utiliser ces engins volants pour la surveillance des manifestations sur la voie publique.

La sanction de la Cnil est plus générale, et concerne le principe même de la surveillance par drone sans cadre législatif. « La procédure initiée par la Cnil est, quant à elle, générale et vise toutes les utilisations de drones par les services du ministère de l'Intérieur (services de police et de gendarmerie, sur l'ensemble du territoire national) pour les traitements visant à prévenir ou détecter les infractions pénales, à mener des enquêtes et à poursuivre leurs auteurs, ou ayant pour but la protection contre les menaces pour la sécurité publique », précise donc la Commission, soucieuse de faire respecter son injonction.

En sera-t-il de même pour l'armée? Mardi, la Direction générale de l'armement (DGA) a passé une première commande de microdrones à la société française Parrot, pour des missions militaires de reconnaissance et de renseignement, selon un communiqué du ministère des Armées. 300 appareils doivent être livrés à partir du mois de juin et pendant cinq ans. 60 % sont destinés à l'armée de Terre, 28 % à la Marine nationale et 12 % pour l'armée de l'Air et de l'Espace.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Archives
Publicité