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Résistances et Libertés
21 février 2021

Tarn. Le cafetier de Lavaur qui avait tué un cambrioleur, libéré sous bracelet électronique

luc fournié

 

Luc Fournié vient de sortir de prison. Le cafetier de Lavaur purgeait une peine de 10 ans de prison pour le meurtre, en 2009, de Jonathan Lavignasse, un adolescent de 17 ans. Il bénéficie d’une libération conditionnelle avec bracelet électronique.

Incarcéré à la prison de Muret depuis mars 2018, Luc Fournié, 65 ans, condamné à 10 ans de prison pour le meurtre en 2009 d’un jeune homme de 17 ans, a été libéré avec port d’un bracelet électronique durant un an. L’avocate de ce cafetier de Lavaur, Martine Esparbié-Catala, avait déposé une demande d’aménagement de peine. «Il y a tout d’abord sa bonne conduite en milieu carcéral. Ensuite, mon client a indemnisé en totalité les parties civiles. Mais il y a surtout son état d’esprit: il a pris conscience et la mesure du drame. Il a fait un énorme travail sur lui-même. Il va désormais essayer de continuer à vivre avec ce drame qu’il portera toujours», nous a précisé l’avocate ce mardi.

Guet-apens

Dans la nuit du 13 au 14 décembre 2009, Jonathan Lavignasse et son complice s’introduisent dans le bar du Pont Saint-Roch par une fenêtre dont ils ont scié les barreaux les jours précédents. Luc Fournié avait prévenu la gendarmerie qui avait promis de mettre le quartier sous surveillance. Il scotche les barreaux sciés. Mais l’homme a peur. Depuis des années, il vit en vase clos, dans un appartement situé à l’étage du bar avec sa mère de 86 ans et sa sœur. Persuadé que les voleurs reviendront, il installe un lit de camp, près du comptoir, et s’arme d’un fusil de chasse. Il bricole une alarme avec un fil de pêche tendu entre une chaise et une table.

Ce lundi 14 décembre 2009, à 2 h du matin, il entend un bruit. Les deux ados viennent de casser une vitre. Il monte chercher son fusil, puis redescend dans le noir. Il patiente. Les deux jeunes cambrioleurs butent sur le fil tendu. Luc Fournié ouvre le feu sur Jonathan touché mortellement. Le cafetier enjambe son corps et tire une seconde fois sur le complice qui réussit à s’enfuir. La balle se loge dans le mur.

Deux procès

Par deux fois un jury populaire condamne Luc Fournié à une peine bien plus lourde que celles requises par le procureur général. En 2015, les jurés de la cour d’assises du Tarn le condamnent à 7 ans d’emprisonnement pour meurtre. La défense et le procureur avaient plaidé l’acquittement. Ils ont échoué à convaincre que Luc Fournié était dans son droit et qu’il n’avait voulu que défendre sa famille. La peur, le sentiment d’abandon malgré le signalement fait aux gendarmes, la volonté de protéger les siens seront opposés à la disproportion de la riposte, le guet-apens, la préméditation. Le 30 avril 2015, la cour d’appel de Toulouse remet en liberté le cafetier.

En décembre 2016, rejugé par la cour d’assises de Haute-Garonne, Luc Fournié voit sa peine alourdie: 10 ans de prison. Une nouvelle fois, le jury populaire va au-delà des réquisitions du parquet. Arrivé libre, Luc Fournié quittera le tribunal pour rejoindre la prison. Il sera libéré, quelques semaines plus tard, jusqu’au rejet du pourvoi en cassation qui le conduira, ce coup-ci, derrière les barreaux. Il serait aujourd'hui allé vivre dans le Lot. À Lavaur, le café du pont Saint-Roch a été vendu.

«Un non à l’auto-défense» pour l'avocat de la famille de la victime

«La sortie de prison sous surveillance de Luc Fournié est un non-évènement. C’est une libération normale qui répond aux critères habituels», note Maître Simon Cohen, avocat de la famille de Jonathan. «L’essentiel est ailleurs. Ce qui va marquer dans cette affaire et qui restera gravé, c’est qu’à deux reprises, un jury populaire a dit non à l’auto-défense». Lors du procès en appel Me Simon Cohen avait terminé sa plaidoirie par un phrase de Camus : « Etre un homme, c’est s’empêcher».

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